Labourer au son des tambours battants

dimanche 28 janvier 2018, par par Pascale Logié

Le tambour est souvent associé aux danses chamanes dans ses formes rituelles, il est une puissance par lui-même. La bourrée est danse populaire d’origine paysanne aux frappes de pas pointés, une danse bondissante unisexe qui martèle le sol.
Madeleine Fournier a pris le parti d’une partition féminine. Une histoire de femme qui se décline sous une tournure plurielle, où le désir féminin prend tout son sens dans une parodie baroque de la complainte amoureuse.

Il est évident que le parcours dansé de Madeleine Fournier est imprégné de recherches sur les danses traditionnelles dans un contexte contemporain anthropologique, hérité de sa formation et ses premières rencontres avec des chorégraphes conceptuels.
La bourrée, dont l’origine multiple et quasi universelle, du Portugal à l’Auvergne est le sujet du spectacle, prétexte à la déclinaison d’un pas à la rythmique simple et répétitive.

Pour ce premier solo, la chorégraphe s’engage corps et voix dans une suite de phrases dansées et chantées. Les partitions vocales toutes en contrastes alternent entre les sonorités graves dionysiaques d’une bouche ouverte, la puissante d’un AH prégnant, le chant mélodieux d’une complainte amoureuse mélancolique.

Madeleine interprète une danse où seule la figure féminine paraît pour être initiée. Dans un accomplissement dont l’homme pourrait être exclu si ce n’est son absence évoquée dans la plainte amoureuse. Madeleine ne revêt pourtant pas la figure d’extase et les phases plus agitées de sa danse ne sont jamais transe. Jamais elle ne s’abandonne, aussi le déshabillage n’est pas dépouillement mais passage.
L’occurrence répétée de ses mains rouges comme représentation du cycle menstruel fait écho au rituel agraire figuré par les frappes de ses bottines noires. Noir comme le simple T-shirt et legging qui dessinent sa frêle silhouette, rouge comme les joues de la figure innocente de la jeune paysanne au labeur.

Par la communion avec la nature, l’expérience physique proprement féminine de la vie se fonde par la rencontre tellurique de la danse : faire l’amour avec la terre.